• Sausadaï Bang !

    Après avoir parcouru 10 000 kilomètres, transité par 5 pays différents et essuyé 36 heures de voyage en voiture, en avion, en minibus et en taxi, me voilà (enfin !) arrivée à Siem Reap.

    Dès les premiers regards, le dépaysement est total. Aux routes de terre rouge les marchands s’harmonisent, foisonnant le long des rues sous des petites cabanes faites de bric et de broc, vendant bouteilles d’eau, d’essence, noix de coco, cigarettes ou plats traditionnels. Les chiens dodelinent entre les bécanes, les tuk-tuk et les 4X4, tous plus kamikazes les uns que les autres (comme s’ils attendaient le dernier moment pour traverser la route). Il y a du monde de partout. Des enfants courent et s’amusent dans les rues, tantôt footeux, tantôt nageurs, plongeant gaiement dans la rivière verte et lisse traversant de parts et d’autres la ville.

    La ville elle-même est faite d’un patchwork de villages, chacun étant concentré autour d’une pagode de laquelle ils tiennent leur nom. Le centre-ville, modeste en taille, est trilatéral. Il se compose d’un marché couvert – caverne d’Ali Baba – mêlant épices, bijoux traditionnels, viandes et poissons, fruits tropicaux, kramas, ventilateurs, statuettes bouddhiques et autres souvenirs pour barangs (expression désignant les Blancs). Formant un angle avec ce souk asiatique, Pub Street est la rue branchée de la ville : clubs et touristes constituent le quartier. De nombreuses ruelles étroites, parallèles à cette dernière, offrent des balades calmes et aérées au sein de cette fourmilière humaine.

     

    Sausadaï Bang ! (24 février 2015)

    Centre-ville de Siem Reap

    Touristes, expats et khmers s’entremêlent et se croisent dans le brouhaha et la poussière de Siemp Reap. La chaleur, humide et prenante, se veut plus sensuelle une fois le soir venu. Les odeurs se mêlent et se démêlent : boisées en bord de rivière, sucrées et douces près des vendeurs de fruits ou d’encens, âcres et puissantes sur les étales de viande auxquelles s’ajoutent le ballet vorace des mouches. De grandes avenues parsemées d’hôtels traversent la ville, et la jungle routière se voit escortée par des arches de guirlandes lumineuses représentant grossièrement les temples d’Angkor. Impossible de ne pas remarquer l’imposante expansion tentaculaire du réseau électrique de la ville : des dizaines de kilomètres de câbles noirs transitent de maisons en maisons ajoutant au décor urbain un capharnaüm presque organisé.

    Je commence peu à peu à me repérer dans le dédale poudreux des rues de la ville, les voyages d’un point à l’autre s’effectuant surtout en moto dop ou en tuk-tuk. Il est plaisant de se perdre et de flâner, sirotant un café glacé ou autre fruit shake (mélange de fruits, glaçons et lait concentré).

    Le week-end dernier, je me suis rendue à Anlong Veng, un village situé à l’extrémité nord du Cambodge, à deux pas de la Thaïlande. Accompagnant Romain et ses amis, nous avons rejoint deux de leurs acolytes travaillant pour la Croix-Rouge, installés là-bas depuis plusieurs mois. Le village est tristement connu du fait que l’un des proches de Pol Pot, Ta Mok, s’y soit retranché à la chute des Khmers Rouges, s’enrichissant du trafic de bois avec la Thaïlande. Sa maison borde un lac artificiel, folie démesurée de l’homme dit cruel et cupide. Ce lac immense est jonché d’un cimetière d’arbres calcinés, droits et charbonneux, comme pour témoigner du passé sinistre du pays. Isolés dans la campagne cambodgienne, nous avons mangé côte à côte avec les khmers ; poulet grillé, riz gluant, bouillon de tripes, abats de canards et légumes remplissaient nos assiettes que l’on accompagnait d’Angkor Beer. Une vielle sono braillait quelques chansons occidentales, entrecoupées de tubes cambodgiens. Nous avons dansé et rit malgré la barrière de la langue. J’ai rencontré Poo (comprendre oncle, terme respectueux pour désigner une personne d’un certain âge), un drôle de personnage. Ne parlant pas l’anglais et moi baragouinant seulement quelques mots en khmer, nous avons tâché de se comprendre avec des gestes et onomatopées. Le lendemain, après un petit déjeuner fait d’un bouillon de nouilles et de poulet, nous sommes rentrés sur Siem Reap, non sans quelques frayeurs, dans un taxi possédant le volant à droite !

    Je commence à prendre mes marques ici et j’essaye tant bien que mal de retenir le vocabulaire de base de la langue locale – Sausadaï Bang (Bonjour mon frère) ; Orkun (Merci) ; Soksabaï (Comment vas-tu ?) – les Khmers sont toujours heureux de nous voir essayer de parler leur langue et nous aident avec le sourire. C’est peut-être ce qui m’a d’ailleurs le plus marqué ici, tout le monde sourit, ou du moins le rend. Les Cambodgiens sont espiègles et plein d’humour, rendant le contact des plus faciles.

    Je me suis évadée un après-midi de Siem Reap afin de visiter une Lotus Farm, située à quelques kilomètres de la ville. On y cultive le lotus dans une éthique de commerce équitable. Les fleurs sont utilisées pour faire du thé (les pétales) et le pistil sert à aromatiser le café. Les tiges sont la ligne directrice du projet de l’entreprise bio-textile Samatoa, puisqu’on en façonne du fil utilisé pour créer des vêtements de luxe. Trop fragile pour l’industrialisation, les méthodes traditionnelles de tissage sont utilisées, faisant ainsi perdurer cette technique ancestrale et créant de nombreux emplois, pour les villageoises notamment.

    Champs de lotus

     Champs de lotus

     

    J’emménage demain dans ce qui sera ma maison pour les trois mois à venir.

     

    A suivre…


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